27 mai 2013
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C’est un grand constitutionaliste que nous perdons
aujourd’hui, celui qui marchait
dans les pas du doyen Vedel. Guy Carcassonne vient de mourir subitement à 62 ans, d’une hémorragie cérébrale que rien ne laissait présager. Cet ancien conseiller de Michel Rocard laisse
un grand vide derrière lui, tant sa présence dans les médias était devenue, ces dernières années, usuelle.
Dans la nuit de dimanche à lundi, alors qu’il était en voyage à Saint-Pétersbourg avec sa femme, Claire
Bretécher, célèbre auteure de bandes dessinées, il a été victime d’une hémorragie cérébrale foudroyante. Ils ont eu ensemble un fils Martin.
Cette nouvelle m’émeut particulièrement, elle évoque un passé déjà lointain (plus de 35 ans déjà…) où
nous nous sommes côtoyés dans l’équipe de Michel Rocard. Jeune diplômé de l’université il faisait partie de l’équipe de l’héritier de Pierre Mendés France qu’incarnait dans les années 1970,
Michel Rocard. A la fois rigoureux en politique, sage et réfléchi, il était aussi plein d’humour avec une ironie parfois féroce, tout aussi féroce que les personnages de sa compagne Claire
Bretécher.
Il est né un 14 mai de l’année 1951. Il fera toutes ses études de droit à l’université de Paris X,
obtenant sa licence en droit (1971) puis ses diplômes d’études supérieures en droit public (1972) et en sciences politiques (1973). Il conduira avec brio sa thèse d’Etat en droit sur la
transition démocratique en Espagne (1979). Il sera un premier temps conseiller juridique du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, puis celui de Michel Rocard, lequel se prépare à l’élection
présidentielle de 1981 où il ne se présentera pas, ralliant au final celle de François Mitterrand.
Il passera l’agrégation en 1983 et rejoindra l’Université de Reims où il enseignera le droit public,
puis ce sera le retour à ses premiers amours : Paris X à Nanterre en 1988.
Il entamera une carrière politique aux côtés de Michel Rocard, à son cabinet de Ministre de
l’agriculture de 1983 à 1985. Puis de 1988 à 1991, comme conseiller à Matignon, en charge des relations avec le parlement. Il nouera à loisir les majorités nécessaires à l’action publique de son
patron et explorera toutes les finesses de l’action parlementaire.
Joueur de rugby dans sa jeunesse au Paris Université Club (PUC), il en a gardé la pugnacité, le goût
pour l’offensive et un sacrosaint respect pour les règles.
Très proche du célèbre constitutionnaliste français Georges Vedel, il en assumera l’héritage et
participera à tous les grands débats publics sur la politique et la société. Il signera une tribune régulière dans l’hebdomadaire Le point et de temps en temps au quotidien Le
Monde. Il avait aussi contribué à la réflexion sur la modernisation des institutions initiée par Nicolas Sarkozy et présidé par Edouard Balladur. Contrairement à son collègue et ami Olivier
Duhamel, partisan d’une 6ième république, il prend le parti de la Constitution de 1958, dont il défendait la souplesse et l’adaptabilité aux circonstances. Il revendiquait ouvertement
l’absolue interdiction du cumul des mandats, qu’il accusait de contribuer à l’affaiblissement du Parlement.
On a pu le voir encore dernièrement dans un documentaire diffusé par la chaine Arte
sur « La Ve république et ses monarques ».
Amoureux de la vie, inventif et curieux, proche de ses étudiants à la faculté, fidèle en amitié, il a
tout au long de sa vie (trop courte) cherché à réinventer la vie, faisant sien ce slogan un peu désuet du parti socialiste des années 70/80.